Mort d’un poête
Ainsi qu’un souffle amer d’alcool s’évapore
Alors que sur la mer le tonnerre roule encore,
Ainsi que cet enfant que l’on entendra plus,
Ennivré par le vent, un oiseau s’est perdu.
Pour mille ou deux mille ans le livre se referme :
L’histoire s’écrit de sang, et puis d’encre et de peine ;
Mais pourquoi faut-il donc que ce soient les plus beaux
Qui derrière l’horizon s’envolent le plus tôt ?
Toi qui nous précéda sur ce chemin d’amour,
Sur ce chemin de croix, sur ce chemin de haine ;
Toi, qui nous a appris souvent que notre sort,
Souvent que notre vie n’attend que notre mort.
Tu as su nous conduire par-delà le soleil,
Par-delà la falaise, par-delà la montagne,
Tu as su explorer les endroits interdits,
Il ne t’en restait qu’un. Tu y es aujourd’hui.
Amis, ne pleurez pas, écoutez-le plutôt.
Regardez-le là-haut qui nous hurle sa joie.
Amis, ne pleurez pas, cela ne sert à rien,
Chantez plutôt sa fin : un poête hier s’est éteint.
©1991